Jean-Christophe Nourisson

   

Bio

Installation


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Art public

Textes

2001 Les abstractions architecturales de JC Nourisson. Texte Sylvie Coëllier. (Translate)

2001 Correspondances. Texte de Christophe le Gac. (Translate)

2004 L'événement et la pensée. Texte de Christophe Kihm.

2010 Perception et corps en mouvement. Texte de Catherine Grout.

2010 Des signes urbains non autoritaires. Texte de Christian Ruby.

2010 Hors Champ. Texte de Cécile Meinardi.


2017 Nomologie. Propos sur les dispositifs urbains de JC Nourisson. Texte de Christian Leclerc.

2021 L'incomplétude des choses. Texte de Jean Louis Poitevin.


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Hors-Champs

« Chaque instant se définit par des visions éphémères et des impressions fugitives, dans un univers en perpétuel devenir »
(à propos des jardins chinois)

L’exposition « Hors-champs » que propose Southart et l’atelier Soardi nous fait découvrir le tout dernier travail de Jean-Christophe Nourisson sur les jardins chinois. L’artiste travaille depuis 2007 autour de ce motif, qu’il a déjà décliné lors d’une précédente exposition en Allemagne à la galerie Voss.
Ainsi, à l’occasion de cette revisitation conceptuelle et poétique de ces millénaires jardins, toute une réflexion de l’artiste s’organise autour des notions d’espace abstrait, de rapport au langage, de cinématique et d’architectonique, qui donne lieu à une exposition complexe, subtile, déroutante, limpide et intrigante tout à la fois. Cette dernière en effet, toute en ductilité phénoménologique, se déplie à partir d’un dispositif architectural, à la fois sculpture et promenoir scopique : une passerelle/ou pont en bois, d’un équilibre architectonique d’une exquise douceur et d’une très suave ergonomie/harmonie invite le spectateur à s’y promener, s’y asseoir en autant de points possibles, à simplement s’y tenir, immobile, ceint de l’espace visuel environnant, « et lui-même vu du dehors, tel qu’un autre le verrait, installé au milieu du visible »1. Désorganisant et réorganisant à loisir l’espace de la galerie, ce promenoir se donne également comme un sorte de promontoire d’observation, fixe ou déambulatoire, de toutes les surfaces d’exposition alentour : de l’immense monochrome en laine de verre, (sfumato de jaune coquille d’oeuf et de blanc) recouvrant tout le mur du fond, sans plus laisser régler sa distance, aux sporadiques plaques noir et blanc, semi-laquées (« photogrammes » des pierres de Liuhu, et « résidus » -comme il les appelle- des ouvrages dits « des pavillons de coupes flottantes ») qui parsèment les deux autres murs -D’où d’ailleurs, pour le grand panneau, le nom d’ « emprunts de vue N°1», tout droit venus de l’expression de « paysages empruntés », qui se rattache à cette antique technique paysagiste destinée à donner l’impression d’un jardin aux dimensions infinies (il n’y effectivement aucune mise au point possible sur ce vaste plan de laine de verre,« dé ou a-perspectivé », et nonobstant « capturé » dans la composition d’ensemble - incendie boréal).

Mais, plutôt que de parler de revisitation, on pourrait se risquer à parler de « visitation », si l’on garde à l’esprit la connotation spirituelle et sacrée dont sont emprunts de tels jardins
(« Bien que tout ceci ne soit qu'une création humaine, elle peut paraître œuvre du Ciel », Ji Cheng). Souvenons-nous que les jardin chinois, à l’instar des poèmes et de la calligraphie appartient aux arts sacrés…
Jean-Christophe Nourisson se proposant de ré-orienter l’espace d’exposition sur celui de flânerie zen de ces jardins magiques, rebascule sans doute celui-ci du côté d’une résolue immancence, notamment matériologique, mais ne cède néanmoins rien quant à l’appel d’un mystère équivalent, voire en constante recrudescence…
Ainsi voué à un questionnement hors-classe, hors-genre, proprement « hors-champ », dont la réponse ne peut que repasser par la convocation d’un secret dont il nous fait les spectateurs ébahis, il oscille constamment entre esthétique et symbolique, ancien et palpable, hermétique et offert, lisible et crypté, et parvient à mettre en place un lieu d'instabilité captivante/fascinante, un espace à la lecture parcellaire, comme ré-enchanté. Et ce n’est le moindre des talents de l’artiste, que d’en réinitialiser - parce qu’à chaque vision éphémère et fugitive d’un espace en perpétuel devenir - l’énigme à l’infini.

Cécile Meinardi

• Merleau-Ponty cité par Stéphane Lojkine qui écrit: « Le scopique est donc l’expérience d’un enveloppement ; la distance tombe, mais en même temps la conscience de la distance (je regarde, je suis regardé) n’a jamais été si grande. »